PORTRAIT : rencontre avec Éric Carlier du Passe-Trame, tisserand dans le Tarn.

Pour réaliser un jean, il y a un certain nombre d’étapes incontournables qui précédent la confection dans notre atelier. Pour certaines des toiles que nous utilisons dans nos confections, à l’instar du jean en laine et celui en chanvre, nous participons activement aux tissages suite aux choix des matières premières. Pour ces lignes exclusives, nous créons nos propres toiles, tissées par un maître dans cet art, Eric Carlier, que nous nous présentons aujourd’hui.

LA DÉFINITION, EN UN MOT, DE CE QU’EST « LE PASSE-TRAME » ?

Le tissage.

ET PLUS EN DÉTAIL, POUVEZ-VOUS NOUS PARLER DE « LE PASSE-TRAME » ?

Tisserand de formation, j’ai créé « Le Passe-Trame » en 1990, dans le bassin textile du Tarn. Au départ on travaillait avec des éleveurs français, pionniers de l’introduction de la race de chèvre angora, alors notre activité se cantonnait à la confection d’écharpes, d’étoles et de couvertures en mohair. Aujourd’hui, on tisse toujours du mohair mais aussi tous types de matières dont de la laine du Causse Méjean et du chanvre pour Atelier Tuffery.

QUELLE SONT LES DIFFÉRENCES ENTRE DES TOILES EN COTON, EN LAINE OU EN CHANVRE ?

Que ce soit pour le coton, la laine ou le chanvre, le montage est le même pour chacune de ces toiles, ce sont les finitions, lavage et séchage, qui ne sont pas tout à fait les mêmes chez l’apprêteur. Après, il y a des fils plus faciles à tisser, le chanvre par exemple n’a pas du tout d’élasticité de laine ou du coton, ce qui le rend plus dur à tisser, mais aussi plus solide. Alors que la laine, quant à elle, a des propriétés thermorégulatrices hors du commun.

POURQUOI EST-CE DEVENU SI DIFFICILE DE SE PROCURER DES TOILES EN CHANVRE ?

En fait, le chanvre en France c’est comme le lin, ce n’est pas si difficile de s’en procurer. Le problème c’est que ce chanvre il est fait pour l’isolation ou l’industrie, il est donc pas d’assez bonne qualité pour faire du fil. D’ailleurs je me souviens, on avait eu quelques demandes, j’en avais tissé pour de l’ameublement. Mais c’est avec VirgoCoop et Julien Tuffery qu’on a pris le temps de sélectionner un chanvre adapté à l’habillement.

QUELLE A ÉTÉ VOTRE RÉACTION QUAND ATELIER TUFFERY VOUS A DEMANDÉ DE TISSER UNE TOILE DE JEAN INTÉGRANT DE LA LAINE ?

Une chaîne en coton et une trame en laine, on ne l’avait jamais fait et je me suis demandé pourquoi personne n’y avait jamais pensé avant ?
Alors quand l’idée a germé, avec Julien Tuffery, on en a discuté avec les éleveurs de moutons du causse Méjean et Julien Buchert, responsable de l’agropastoralisme dans les Cévennes. On était tout de suite tous partants !

L’ANECDOTE INÉDITE À PROPOS DE VOTRE COLLABORATION AVEC ATELIER TUFFERY ?

Au-delà de l’aspect économique de notre collaboration, j’aime le dynamisme de Julien et de Myriam et j’adore leur atelier. J’aime aussi monter sur le Causse car j’ai une bonne relation avec les éleveurs. En fait, grâce à cette rencontre j’ai découvert une magnifique région, la région cévenole, je m’y rends avec plaisir, mais pas assez souvent à mon goût.

QUEL MODÈLE PRÉFÉREZ-VOUS CHEZ ATELIER TUFFERY ?

J’ai un jean Alphonse Chanvre d’Atelier Tuffery, j’aime par-dessus tout le touché de cette toile, il est bien différent de celui des jeans classiques et sa coupe traditionnelle fait qu’il n’a rien à envier aux jeans en coton que je porte habituellement.

JEAN HOMME ALPHONSE BRUT 100% CHANVRE
– TAILLEUR

QUEL PROJET DE TOILES INNOVANTES POUR LES FUTURS JEANS D’ATELIER TUFFERY ?

Pourquoi pas continuer avec les matières naturelles ! Il y a quelques temps j’ai envoyé à Julien Tuffery une toile avec du fil en poil de chameau du Tibet, c’est un poil très très fin semblable à l’alpaga, utilisé traditionnellement pour les pardessus. J’aimerais aussi essayer de tisser une toile en chanvre et en coton, un peu comme pour la laine. Et sinon, il nous reste beaucoup de matières nobles à explorer comme le cachemire et l’alpaga…

 QUE PEUT-ON VOUS SOUHAITER POUR L’AVENIR ?

De pouvoir continuer notre activité et de développer une filière laine qui soit, de l’élevage du mouton jusqu’au créateur, 100% française.

 

 

Merci Eric Carlier, qui présentera les prototypes de Le passe-trame au salon Made in France Première Vision, les 3 et 4 avril 2019 au Carreau du Temple à Paris.